Micro-trottoir – l’environnement à Strasbourg

Français :

Qu’entendez-vous par « environnement » si on vous pose la question ? Quelles notions et quels lieux y associez-vous lorsqu’il s’agit de parler d’environnement en plein cœur d’une grande ville comme Strasbourg ? Nous avons voulu nous rendre compte de ces représentations auprès de quelques habitants, grâce à une petite enquête, sous la forme d’un « micro-trottoir », réalisée entre le 4 et le 8 avril 2016 par Marie Auburtin, à l’occasion de la manifestation « Campus vert » à Strasbourg et suite à notre colloque sur les jardins urbains qui a eu lieu fin mars 2016, également sur le campus strasbourgeois.

Effectuée sur 100 personnes dans la capitale alsacienne, dans deux lieux différents (le campus universitaire et le parc de l’Orangerie) et sur Internet, cette courte enquête composée de trois questions permet de formuler des hypothèses sur les connaissances des résidents strasbourgeois en ce qui concerne l’environnement et les jardins dans la ville, qu’ils soient familiaux ou partagés.

Notre échantillon n’est en rien représentatif, puisque l’enquête a été effectuée dans le flux réel : il est composé de 23 hommes et de 77 femmes, tous majeurs. 23 d’entre eux sont âgés de 18 à 19 ans, 52 de 20 à 29 ans, 17 de 30 à 59 ans et 8 de 60 à 89 ans. 11 viennent de l’étranger, 59 sont originaires d’Alsace, et les 30 restants viennent d’autres régions françaises. 71 sont étudiants, et les 29 autres appartiennent à différentes catégories socioprofessionnelles (cadres, employés, professeurs, retraités etc.).

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La première question consistait à proposer une caractérisation de l’environnement à Strasbourg en mentionnant trois mots ou notions. C’est l’aspect « gestionnaire » de l’environnement par la collectivité qui apparaît en première position dans les citations des personnes interrogées : ainsi,  la majorité d’entre elles ont commencé par citer ces aspects de gestion, vus de manière positive (39 %), auxquels il faut ajouter 8 % de personnes qui considèrent que les initiatives et les actions concrètes telles que le tri, le recyclage ou encore le « plan 0 phyto » constituent les points forts de l’euro-métropole. Au contraire, des critiques quant à la manière dont la ville gère la problématique de l’environnement ont été formulées par 15 % des interviewés (pollution, circulation, manque d’espaces verts, industrialisation croissante). Pour 19 % des répondants, la verdure (parcs, jardins etc.) est un élément primordial à Strasbourg, alors que seulement 2 % d’entre eux ont en premier lieu cité l’aquasphère (cours d’eau et rivières). Enfin, pour 11 % des interviewés, le développement des transports « écolos » (transports en commun, vélos, zones piétonnes etc.) à Strasbourg est plutôt judicieux (6 % n’avaient pas d’avis sur la question).

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Ce sont majoritairement les aspects positifs de la ville (métropole attractive, propre, jeune, etc.) qui ont été mis en avant par les différentes catégories de personnes interrogées : 48 % des hommes, 36 % des femmes, ainsi qu’une majorité d’étudiants, de personnes originaires de grandes villes comme de la campagne, voire de l’étranger… Au vu de ces résultats, nous pouvons supposer que la plupart des personnes interrogées, bien qu’elles ne mettent pas forcément en avant les initiatives de la ville en matière d’écologie, estiment  cependant vivre dans un environnement agréable.

La deuxième question devait permettre d’évaluer si les répondants faisaient ou non un lien entre l’écologie et leur alimentation.

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Plus des trois-quarts des interviewés disent établir un lien entre l’écologie et leur alimentation. A une demande de précision sur la nature de ce lien, les réponses peuvent être classées dans cinq catégories différentes ; premièrement, 43 % d’entre eux déclarent faire attention à la provenance de leurs produits alimentaires, favoriser le bio et les circuits courts. En seconde position, 30 % des interrogés avancent des arguments en faveur de la protection de l’environnement (non-utilisation des pesticides, protestation contre les élevages en batterie etc.), et 13 % dressent la liste de leurs engagements personnels (le fait de cultiver son propre jardin par exemple). Enfin, 10 % des interrogés affirment qu’ils tentent de combiner écologie et alimentation afin de rester en bonne santé (4 % ont formulé la réponse « ne sait pas »). Il est notable qu’établir ce lien n’est guère plus « féminin » que « masculin » : 73 % des femmes déclarent faire un lien entre écologie et alimentation (41 % d’entre elles affirment acheter bio et 36 % se sentent concernées par la sauvegarde de l’environnement). Elles sont donc suivies de près par les hommes (70 % de « oui »), avec 50 % d’entre eux contrôlant la provenance de leurs aliments au quotidien. Comme le sexe, les catégories socioprofessionnelles semblent peu influer sur les  représentations du lien écologie-alimentation.

Pour finir, la troisième question était destinée à estimer le nombre approximatif de personnes connaissant l’existence de jardins alimentaires à Strasbourg (cette appellation regroupe, entre autres, les jardins familiaux et les jardins partagés). Avec 4 800 jardins familiaux (aussi dits « ouvriers ») et un grand nombre d’initiatives jardinières (jardins partagés de quartiers ou d’associations, Incroyables Comestibles etc.), Strasbourg fait figure de ville « jardinière » en France. Cette caractéristique est-elle connue des personnes qui y résident, en particulier des étudiants qui y vivent ?

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Seul un tiers des personnes interrogées a répondu positivement. De plus, les noms cités en exemple ne correspondaient pas toujours à des jardins alimentaires :

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 Il y a effectivement des jardins partagés à la Krutenau, près de la rue Ste Madeleine, dans la Petite France, vers St Jean, au Neudorf (le « Lombric Hardi »). Un jardin supplémentaire est également géré par l’association Campus Vert ; il existe également des jardins familiaux le long de l’autoroute A4, à Schiltigheim, à la Meinau, dans le quartier de l’Esplanade, à Koenigshofen, à Geispolsheim et dans le quartier de la Robertsau. Cependant, le jardin botanique est un parc urbain, et les AMAP, la Nouvelle Douane, Botanica, les Incroyables Comestibles, la Montagne Verte et la « Ruche qui dit oui » sont des circuits commerciaux. Il faut bien sûr prendre en compte les personnes ayant entendu parler de l’existence de tels jardins sans pour autant être capables de les nommer. En bref : si les interviewés ont entendu parler de « jardins alimentaires », ils ne savent manifestement pas toujours ce que recouvre ce terme.

43 % des hommes interrogés déclarent avoir entendu parler d’un ou de plusieurs jardins alimentaires, contre seulement 30 % des femmes. L’origine géographique des enquêtés semble discriminante. En effet, 37 % des citadins ont répondu par l’affirmative ; c’est 5 % de plus que les personnes interrogées originaires de villages de campagne : cette différence notable proviendrait-elle d’une différence d’appréciation du paysage urbain, les citadins étant plus attentifs que les « ruraux » aux éléments de nature qui parsèment la ville ? Ou bien y aurait-il un effet de familiarité « inversée », c’est à dire que les citadins notent le contraste entre éléments minéraux et jardins, tandis que pour les « ruraux », le jardin fait partie du paysage habituel et n’est donc pas remarqué ? Une autre explication pourrait être liée à la familiarité avec les lieux, qui expliquerait simplement une meilleure connaissance du terrain local (Strasbourg) des citadins, simplement parce qu’ils y ont vécu plus longtemps. Cette hypothèse est corroborée par un autre recoupement : 25 % des étudiants interrogés peuvent citer des jardins alimentaires à Strasbourg, alors que les personnes issues d’une catégorie socioprofessionnelle différente (tous emplois confondus) étaient 52 % dans ce cas. Les étudiants donc, généralement plus jeunes mais aussi en grande partie « de passage » et peu anciens sur le territoire, donc moins familiers des lieux, connaîtraient moins les jardins que les autres catégories sociales, qui, dans notre échantillon, renvoient également à une population plus âgée.

Une question que nous n’avons pas posée et qui nous auraient permis de trancher dans les hypothèses, renvoie à la durée de résidence à Strasbourg. Nous aurions alors également pu comprendre, avec cet éclairage, la faible différence constatée dans la connaissance des jardins, entre les répondants originaires de l’agglomération strasbourgeoise et ceux nés à l’étranger ou ailleurs en France : ils sont respectivement 33 % et 30 % à avoir répondu que « oui », ils connaissent l’existence de jardins alimentaires à Strasbourg. 39 % d’entre eux n’ont pas pu trouver d’exemple concret, 27 % d’entre eux ont cité des circuits commerciaux ou des parcs (les AMAP, le jardin botanique etc.) et le reste des interrogés ont donné  des réponses plutôt vagues : la plupart du temps, ils situent un jardin au sein d’un quartier sans savoir son nom ou la catégorie à laquelle il appartient (jardin familial, partagé etc.) ; seuls quelques uns d’entre eux ont mentionné les noms exacts des jardins partagés du Lombric Hardi (Neudorf) et de Grimeissen (Grand’Rue). Il est clair que si les appellations de jardins « alimentaires », « familiaux » ou « partagés » ne sont pas inconnues à la population strasbourgeoise, leur signification et leur position dans la ville restent elles, largement méconnues.

Ce petit échantillon d’interviewés ne permet pas de tirer des conclusions définitives à partir des trois questions posées dans ce micro-trottoir. S’il s’avère que les réponses varient assez peu selon le sexe, l’âge, la catégorie socioprofessionnelle ou encore la ville ou la région d’origine des répondants, il n’en reste pas moins que cette enquête témoigne d’une certaine méconnaissance de la part des résidents en ce qui concerne les jardins urbains en général, et les initiatives de la ville, de diverses associations et autres groupes liés à l’environnement en particulier.

Si vous souhaitez en savoir un peu plus sur les jardins urbains existants à Strasbourg, un reportage sur les PUC (Potagers Urbains Collectifs) de l’euro-métropole est également en ligne sur ce site.

English:

Street poll: the environment in Strasbourg

What if someone was to ask you what “environment” meant to you? What notions and what places do you associate to this word when it comes to talk about environment in the heart of a city as big as Strasbourg? We wanted to get the inhabitants’ ideas about these representations. On the occasion of the event “Campus Vert” in Strasbourg, and as a follow-up to our conference about urban gardens which took place on the university campus (also in Strasbourg) at the end of March 2016, a small survey – in the form of a street poll – was conducted by Marie Auburtin between the 4th and the 8th of April 2016.

Conducted on 100 inhabitants in the biggest city in Alsace – in two different places (the university campus and the “parc de l’Orangerie”) and on the Internet, this 3-question survey allows us to make assumptions about what the residents of Strasbourg know about the environment and the gardens in the city (whether they are family or shared gardens).

Our sample cannot be significant, because the survey was conducted in the actual flow: it is composed of 23 men and 77 women (all of legal age). 23 of them are aged from 18 to 19, 52 from 20 to 29, 17 from 30 to 59 and 8 from 60 to 89. 11 come from foreign countries, 59 from Alsace and the remaining 30 come from other French regions. 71 are students and the remaining 29 belong to different socio-professional categories (executives, employees, teachers, pensioners etc.).

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The goal of the first question was to ask people to characterize the environment in Strasbourg with three words or notions. The management of the environment by the municipality ranks first in the respondents’ answers: a majority of them started talking about these positive forms of management (39 %), and 8 % thought that initiatives and concrete actions such as waste sorting, recycling or the “plan 0 phyto” (against crop protection products) were Strasbourg’s key strengths. On the contrary, 15 % of the interviewees criticized the way the city is dealing with environmental issues – pollution, traffic, lack of green areas, expanding industrialization. For 19 % of the respondents, greenery (parks, gardens etc.) is essential in Strasbourg, but only 2 % of them gave watercourses, rivers and ponds as their first answer. Finally, for 11 % of the interviewees, the development of “eco-friendly” means of transport – such as public transportation, bikes and pedestrian areas – in Strasbourg is a really good thing (6 % didn’t have any opinion on the subject).

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The positive aspects of the city (attractive, clean, young etc.) mostly rank first among the different categories of respondents: 48 % of the men, 36 % of the women as well as a lot of students, people coming from other big cities or from the country, foreign interviewees etc. Reflecting these results, we can assume that most of the respondents, even when they don’t necessarily notice the city’s ecological initiatives, still think that they live in a nice environment.

The second question was supposed to allow an evaluation of the link the respondents make between ecology and their diet.

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More than three quarters of the interviewees make a link between ecology and their diet. After we asked them to precise the nature of this link, we were able to classify their answers in five different categories; firstly, 43 % declare paying attention to the provenance of their food and trying to encourage biological agriculture along with short circuits. Secondly, 30 % of the respondents make arguments in favour of environmental protection (prohibition of pesticide use, protests against battery farming etc.), and 13 % list their personal commitments (having a garden of one’s own for example). Lastly, 10 % of the respondents try to combine ecology and a good diet in order to stay healthy (4 % had no opinion on the subject). The answers don’t differ according to the sex of the interviewees: 73 % of the women declare that they make a link between ecology and their diet (41 % of them buy biological products and 36 % take environmental protection to heart). Men are really close behind (70 % of “yes”), and 50 % of them say that they control the provenance of their food. Like the sex, the socio-professional category of the respondents doesn’t seem to have an impact on the representations of the link between ecology and our everyday diet.

The last question was supposed to give us an idea about the number of people who knew of food gardens in Strasbourg (this designation regroups family and shared gardens – among others). In France, thanks to its 4,800 family gardens (also called “jardin ouvriers”) and to a great number of gardening initiatives (creation of shared gardens in a lot of neighborhoods, Incredible Edibles etc.), Strasbourg is seen as a city “for gardeners”. What do its inhabitants – and students in particular – really know about this characteristic?

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Only one third of the respondents answered positively. Moreover, the names given as examples didn’t always correspond to food gardens:

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There are indeed shared gardens in “la Krutenau”, near “rue Ste Madeleine”, in “la Petite France”, near “St Jean”, in “le Lombric Hardi” in “Neudorf” (a neighborhood). The “Campus Vert” association is also managing another garden; there are also family garden along the A4-highway, in Schiltigheim, in “la Meinau”, in “Esplanade”, in Koenigshofen, in Geispolsheim and in “la Robertsau”. However, the botanical garden is an urban park, and the “AMAP”, “la Nouvelle Douane”, “Botanica”, “les Incroyables Comestibles” (Incredible Edibles), “la Montagne Verte” and “la Ruche qui dit oui” are channels of trade. Of course, the people who heard of those gardens but who are unable to name them must also be taken into account. In a nutshell: if the interviewees know of “food gardens”, they obviously don’t always know what this denomination means.

43 % of the male respondents (and only 30 % of the women) have already heard of one or several food gardens. The geographical origin of the interviewees seems to be discriminatory. Indeed, 37 % of city-dwellers answered positively; there is a 5-% difference compared to the respondents coming from the country: can this difference come from a changing point of view regarding the urban landscape – city-dwellers being maybe more attentive to the natural elements disseminated in the city? Or is there a “reversed” familiarity effect? City-dwellers notice the contrast between mineral elements and gardens, whereas “rural” people consider gardens as part of their usual environment, and thus don’t necessarily notice them. Another explanation could be linked to the familiarity with this same environment, which would simply explain why city-dwellers – who have lived there for a longer time – know Strasbourg better. This assumption is substantiated by another cross-referencing: only 25 % of students can name food gardens in Strasbourg, whereas 52 % of people from other socio-professional categories have some knowledge about them. We can thus assume that students – who are not only younger, but most of the time also “part-time” residents who only stay in Strasbourg for a few years – don’t know the area and the gardens very well compared to other socio-professional categories, which in our sample also refer to an older population.

We could have asked another question which would have allowed us to choose one of these assumptions over the others: the respondents’ residence time in Strasbourg. Those answers would have allowed us to understand the small differences between the answers of people coming from Strasbourg and people coming from other French regions or foreign countries: respectively 33 % and 30 % of them told us that they knew of food gardens in Strasbourg. 39 % couldn’t find examples, 27 % gave names of channels of trade or parks (“AMAP”, the botanical garden etc.) and the remaining interviewees gave unclear answers: most of the time, they can tell if there is a garden in a neighborhood or another, but they don’t know its name or the category it belongs to (shared or family garden for example); there were only a few references to some gardens’ exact names: “le Lombric Hardi” (“Neudorf”) and “Grimeissen” (“Grand’Rue”). We can see that if the inhabitants of Strasbourg have already heard of food, family or shared gardens, they still don’t know much about their meaning or their location in the city.

This small sample of interviewees doesn’t allow us to draw definite conclusions from the three questions asked in this street poll. Though the answers don’t really depend on the respondents’ sex, age, socio-professional category or hometown, this survey still shows that the residents don’t know much about urban gardens in general, and about the environmental actions taken by the city and different associations and groups in particular.

If you want to learn more about urban gardens in the city, a report about collective urban vegetable gardens (PUC in French) in Strasbourg is also available on this website.